L'évacuation de la bibliothèque et des archives entre 1914 et 1917

Reims dans la guerre en 1916.

En 1914, la Bibliothèque et les Archives sont logées à l’hôtel de ville dans des conditions bien peu commodes. La Bibliothèque est au premier étage et occupe 4 salles, dont l’une d’à peine 20 places pour les lecteurs. Quant aux Archives, installées au deuxième étage, elles utilisent un ensemble de pièces disparates et éloignées les unes des autres. La Bibliothèque de Reims avec ses 150 000 volumes se situe alors à la 8ème place des bibliothèques municipales pour le nombre des imprimés et à la dixième pour le nombre des manuscrits. Son  conservateur est Henri Jadart qui a pour adjoint Georges Boussinesq, auteur avec Gustave Laurent d’une monumentale Histoire de Reims et qui, mobilisé au sein du 322e RI, est tué le 30 octobre 1914 près de Cormicy. Les Archives, quant à elles, ont pour conservateur Gaston Robert qui, mobilisé au 147e RI, sera blessé aux Eparges le 5 avril 1915.

Avec la guerre, la Bibliothèque et les Archives ferment et le 28 août 1914. Par crainte des vols, on enferme dans le coffre-fort de la Bibliothèque les documents jugés les plus précieux. L’opération est menée par Henri Jadart, Louis Demaison, archiviste de Reims de 1876 jusqu’ à sa retraite en 1913, et Victor Charlier, employé principal de la Bibliothèque. Au début du mois d’octobre 1914, et par crainte cette fois des bombardements, le contenu de ce coffre est mis à l’abri dans les caves voûtées du musée des beaux-arts de la rue Chanzy. On transporte aussi dans ces mêmes caves, entre novembre 1914 et janvier 1915, une quarantaine de caisses de manuscrits et d’ouvrages précieux.

A partir du printemps 1915, l’évacuation est supervisée par Henri Loriquet. Né à Reims en 1857, fils de Charles Loriquet qui a été conservateur de la Bibliothèque de Reims de 1853 à 1889, il a occupé successivement les postes d’archiviste départemental du Pas-de-Calais puis de bibliothécaire de la ville de Rouen. Revenu à Reims et bénéficiant de l’appui de son cousin, l’adjoint Emile Charbonneaux, il est chargé par Jean-Baptiste Langlet de poursuivre le déménagement de la bibliothèque et des archives.

De mars 1915 à avril 1917 sont ainsi évacués vers la crypte de l’église Sainte-Clotilde, et à l’aide de la voiture des pompiers ou de charrettes hippomobiles, 190 m3 de documents et d’ouvrages choisis par Henri Loriquet. Cependant si les documents entreposés à Sainte-Clotilde se trouvent désormais à l’abri des bombardements, ils ne le sont pas de l’humidité dans la mesure où ce n’est que tardivement que l’on établit un plancher. Cela  entraînera, du coup, un certain nombre de pertes parmi les ouvrages mis au départ en contact direct avec le sol.

Henri Loriquet emmène hors de l’hôtel de ville les archives allant jusqu’au premier 1/3 du XIXe siècle. Le fonds départemental, le fonds municipal, les registres paroissiaux d’état-civil, la collection Tarbé, les plans anciens sont transportés aux Archives nationales à Paris en février 1917. Sont entreposés dans la crypte de l’église sainte-Clotilde les archives de l’ancien bailliage, le plan cadastral et les matrices de 1809, les archives hospitalières antérieures à la Révolution. En ce qui concerne la bibliothèque, Henri Loriquet évacue les manuscrits, les incunables jusqu’à 1525 environ, les livres rares (en particulier ceux venant du premier imprimeur rémois, Nicolas Bacquenois), les estampes. La Bibliothèque nationale, à Paris, reçoit en dépôt les manuscrits, les incunables et les plus beaux livres de la collection Diancourt et le reste est entreposé à Sainte-Clotilde. Cette évacuation partielle permet ainsi à une partie de la bibliothèque et des archives d’échapper à l’incendie de l’hôtel de ville le 3 mai 1917. Au total, Henri Loriquet dit avoir pu mettre à l’abri 27 % du linéaire de la bibliothèque mais en raisonnant qualitativement il estime que 48 % des ouvrages de valeur ont été sauvegardés. Evacué en avril 1917, Henri Loriquet devient provisoirement archiviste auxiliaire aux Archives nationales à Paris, avant que le docteur Langlet ne le nomme conservateur de la Bibliothèque de Reims le 1er mars 1919, fonction qu’il occupera jusqu’en 1929.


 

Dernière mise à jour : 21 octobre 2022

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